Nos productions 2022
en éducation permanente
Chapitre I - Nos analyses et nos étudesChapitre II - Nos servicesChapitre III - Notre centre de documentation |
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Par Saki Kogure Diffusion via la newsletter de janvier intitulée « Pauvreté et santé mentale ». |
La crise sanitaire a produit une dégradation de la santé mentale des personnes précarisées ; c’est au départ de ce constat que le RHESEAU (Réseau Hennuyer pour l’Épanouissement et la Santé mentale des Enfants, Adolescents et Usagers assimilés) s’est adressé au RWLP pour réaliser une analyse de la situation qui s’appuie sur la participation des premiers concernés. RTA s’est vu solliciter dans ce cadre pour réaliser, en collaboration avec le Projet Educatif Particulier en aide à la jeunesse du RWLP, le recueil des témoignages et pour procéder à une analyse de leurs analyses.
14 interviews ont été réalisées, autour de trois groupes de questions.
- Comment les groupes sociaux défavorisés analysent-ils les causes des difficultés vécues en matière de santé mentale ? En particulier, quels sont d’après eux les impacts de la pauvreté sur la santé mentale ?
- Comment ces groupes comprennent-ils le champ de la santé mentale ? Lesquelles des représentations de la santé mentale sont-elles dominantes dans le cas de ces groupes sociaux défavorisés ?
- Comment ces groupes analysent-ils le rapport avec les professionnels de la santé mentale ? Quels sont les éléments qui favorisent ou défavorisent la construction d’un bon rapport avec les professionnels ?
L’objectif de la démarche engagée par le RHESEAU était de soutenir des politiques de prévention pour les jeunes et les familles durement touchés par les effets de la pandémie.
L’étude avance ainsi, à partir des analyses réalisées par les personnes en réponse aux questions, quelques points d’attention à développer dans des pratiques de prévention qui prennent en compte dans les approches de la santé mentale les spécificités de ces populations.
Par Philippe Mahoux et Jean Blairon Diffusion via la newsletter de février intitulée « Vers une disparition des corps intermédiaires ? ». |
Il semble évident que la pandémie Coronavirus doit d’abord être comprise au niveau du système sanitaire, tant il est vrai que les institutions hospitalières, ces acteurs sociaux devenus centraux sur la scène politique, exigent actuellement une attention particulière et une gestion d’une meilleure qualité.
Cependant, quelle que soit la légitimité de cette observation, il convient en même temps de souligner que la crise sanitaire est le révélateur, voire le générateur, d’autres types de crise, dont on mentionnera au premier chef celles économique et démocratique. Les débats au sein du Codeco sont exemplaires dans ce sens, comme l’illustrent, entre autres, les contestations des mesures gouvernementales visant la fermeture des établissements culturels. C’est dans le sillage de ces multiples crises que cette analyse propose une nouvelle problématisation du concept de démocratie en évitant de la situer au seul niveau de l’agir individuel et en mettant en valeur l’idée de « champ » mobilisée par Bourdieu. Le gain d’une telle problématisation consiste dans l’éclairage qu’elle permet du rapport entre la politique et le champ journalistique, un rapport structuré par l’agir des corps intermédiaires dont l’interaction est tantôt consensuelle, tantôt conflictuelle.
Par Jean Blairon et Philippe Mahoux Diffusion via la newsletter de février intitulée « Pouvoirs publics et pratiques de consultance : quelles leçons à l’époque contemporaine ? ». |
La démocratie, faut-il le rappeler, ne peut pas se réduire aux moments électoraux de la vie collective. Elle est aussi, et sans doute surtout, l’ensemble d’actions par lesquelles le sujet participe au processus de construction des normes collectives régissant le fonctionnement des institutions publiques. C’est dire en même temps que les normes, loin d’être des principes extérieurs à appliquer aux différents niveaux des institutions, sont immanentes à celles-ci.
La séparation des normes de leur processus de construction, geste pouvant donner à croire que celles-là sont extérieurs à celui-ci, est ainsi un danger à éviter. Or c’est ce danger qui guette les institutions étatiques lorsqu’elles font de plus en plus appel à des firmes de consultance internationales.
Philippe Mahoux et Jean Blairon analysent ce danger ainsi que les formes qu’il peut revêtir dans les sociétés contemporaines. L’analyse institutionnelle qu’ils proposent permet en même temps de comprendre la manière dont les institutions publiques peuvent éviter leur capture par les firmes de consultance. L’intérêt de cette problématisation est de se demander si les acteurs publics ne sont pas à même de répondre à leurs propres exigences normatives sans tomber dans le mirage d’un pouvoir extérieur se croyant être le dépositaire de connaissances irrévocables.
Par Oleg Bernaz Diffusion via la newsletter de mars intitulée « Processus de subjectivation et ses conditions pratiques d’expérimentation collective - Langage, action, environnement ». |
L’identité du sujet n’est pas une donnée naturelle, elle est plutôt le résultat d’une construction sociale et culturelle. Celle-ci peut se déployer dans un double sens qui soit favorise l’augmentation des capacités du sujet (ce que l’on pourrait appeler subjectivation), soit qui les diminue (ce que l’on peut nommer désubjectivation).
Cette analyse interroge le rôle que peut jouer le langage dans les deux sens susmentionnés. Pour ce faire, nous évoquons deux théories du langage, l’une proposée par Marshall Rosenberg, l’autre par Mikhaïl Bakhtine. L’enjeu est de revenir sur le problème de la stigmatisation et son dépassement tout en faisant attention aux rapports de forces sociales qui surdéterminent l’action collective des sujets.
Par Jean Blairon Diffusion via la newsletter de juin intitulée « Violences institutionnelles faites aux femmes et aux enfants : quelles lectures ? ». |
L'occasion de traiter cette thématique nous a été donnée par le mouvement d’Education permanente Vie Féminine, qui lance en cette année 2022 une campagne de sensibilisation aux violences institutionnelles faites aux femmes.
Pour ce faire, le mouvement a organisé le 3 mai une journée de formation à l’intention de ses travailleuses à laquelle Jean Blairon a été invité à participer. Il lui était demandé d’apporter l’éclairage de l’analyse institutionnelle sur le concept même de « violences institutionnelles » : comment les définir ? Quels sont leurs fonctionnements ? L'analyse est une retranscription de cet exposé.
Par Saki Kogure Diffusion via la newsletter de juin intitulée « Violences institutionnelles faites aux femmes et aux enfants : quelles lectures ? ». |
Analyse consacrée à un type spécifique de violence institutionnelle : les violences sexuelles faites aux enfants dans la perspective ouverte par Muriel Salmona et Denis Mukwege.
Outre, on le verra dans l’analyse de l'auteure, que cette thématique fait l’actualité politique et légistique dans notre pays, il a semblé utile d’aborder cette thématique des violences sexuelles dans le contexte de toutes nos recherches sur la subjectivation.
Par Philippe Mahoux et Jean Blairon Diffusion via la newsletter de août intitulée « Comprendre le champ politique ». |
En juillet 2022, une ancienne présentatrice du JT de la RTBF est désignée par le Président du MR, Georges-Louis Bouchez, comme Ministre belge des Affaires étrangères. Cette décision est pour le moins inattendue : désigner une absolue novice en politique, même pas membre du Parti, à un poste régalien comme celui-là, en pleine crise diplomatique due à la guerre en Ukraine, a évidemment suscité bon nombre de réactions médiatisées. Maintenant que cette agitation médiatique est quelque peu retombée, comme toutes les autres du même genre, il peut être utile de se demander ce que cette nomination peut nous apprendre sur l’état du champ politique.
Le point de vue de cette analyse ne porte donc pas sur la personne désignée à ce poste aussi exigeant que convoité, ni sur le parti ou le Président de parti qui l’a choisie ; nous nous intéresserons ici à des questions de fonctionnement et d’évolution de la vie politique, c’est-à-dire, pour reprendre ce concept de Pierre Bourdieu, à des questions de champ politique.
Par Jean Blairon Diffusion via la newsletter de septembre intitulée « "Faire l’économie de la culture ?" ». |
Le 30 septembre 2022, le mouvement d’éducation permanente Présence et Action Culturelle (PAC) a organisé au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles une mise en débat des rapports entre économie et culture. Le titre de la journée donnait un bon écho de ce qui a été perçu et vécu pendant la crise sanitaire : « Faire l’économie de la culture ? ».
Une table ronde a donné la parole à des artistes de terrain et des ateliers ont mis le focus sur la thématique du statut d’artiste, d’une part et des inégalités de genre dans le domaine de la culture, d’autre part.
En liminaire, Jean-Gilles Lowies a fait le point sur l’histoire, les enjeux et perspectives des financements des politiques culturelles ; Jean Blairon a proposé une analyse institutionnelle et politique des articulations entre économies et cultures, en soulignant d’emblée la pluralité inhérente aux deux termes et, par voie de conséquence, les espaces de choix qui les traversent. C’est un développement de son intervention que nous proposons ici.
PAC a par ailleurs consacré le n° 57 de ses Cahiers de l’éducation permanente aux questions débattues dans cette journée ; on peut se le procurer via le site https://www.pac-g.be/
Par Oleg Bernaz Diffusion via la newsletter de septembre intitulée « L’article 60, un facilitateur de l’accès au travail ? ». |
Cette étude a été réalisée à l'initiative et en collaboration avec le Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP). Elle vise à comprendre et interroger les conditions réelles de travail encadrées par ce que l’on a coutume d’appeler « article 60 ». Pour ce faire, une série de 30 entretiens avec les bénéficiaires d'un article 60 ont été réalisés.
Le point de départ de cette étude est l’expérience vécue des personnes qui ont bénéficié d’un article 60, mais aussi et surtout l’analyse qu’elles en font. L'étude se penche donc sur les conditions de travail dans le cadre de l’article 60 et le rapport que ces conditions entretiennent avec les objectifs énoncés dans la législation belge, en particulier la loi organique concernant le fonctionnement des CPAS. Jusqu’à quel point ces objectifs sont-ils respectés et comment peut-on améliorer le dispositif « article 60 » pour qu’il réponde au mieux aux besoins réels des personnes concernées ? Telle est la question principale à laquelle cette étude se propose de répondre tout en ouvrant le débat autour du problème majeur de l’accès au travail.
Analyses 2022parues en extérieurs |
Par Jacqueline Fastrès et Oleg Bernaz Paru dans L’observatoire n°111 de juillet 2022, « L’usager au centre des réseaux » https://revueobservatoire.be/L-usager-au-centre-des-reseaux |
L’observatoire a consacré un numéro de sa revue à la question du travail en réseau dans le social, en la présentant de la sorte : « Faire réseau peut s’avérer très utile dans les cas de détresses multiples où l’usager se trouve à l’intersection de plusieurs secteurs et domaines de compétences. Il permet de mettre fin aux jeux de ping-pong et de redonner à l’usager du pouvoir d’agir. Pour les professionnels, cette mise en commun est également bénéfique, car elle favorise la créativité, la remise en question, l’amélioration des pratiques. Cependant, l’art du maillage reste délicat et tous les réseaux n’atteignent pas les mêmes résultats. Une certaine vigilance s’impose pour ne pas tomber dans les nombreux pièges possibles. »
La revue a confié aux auteurs l’article liminaire de ce numéro, eu égard aux travaux de RTA sur la question. Dans le champ du travail social, le travail en réseau peut se développer en fonction de trois grands centres de gravité : la prise en charge des bénéficiaires, la réflexion sur les problématiques et/ou les pratiques, et enfin des actions de plus ou moins grande envergure à mettre en place. À travers un exemple, cette analyse se penche plus spécifiquement sur le premier niveau, tout en montrant en quoi d’autres centres de gravité s’invitent toujours nécessairement dans ce premier cercle. Il propose ensuite une analyse critique des métamorphoses de la « forme » travail en réseau sous le poids du néolibéralisme.
Par Jean Blairon in Faire l’économie de la culture ?, Les cahiers de l’Education permanente n°57, PAC, septembre 2022, pp. 11 à 19. https://www.pac-g.be/cahier-57-faire-leconomie-de-la-culture/ |
Ce n° des Cahiers de l’EP prends source dans le constat que la crise sanitaire due au Coronavirus a plongé le monde culturel et artistique dans de lourdes difficultés, étant relégué à un statut de « non-essentiel ». Sur la quatrième de couverture de ce cahier, PAC explicite son souhait de « requestionner les politiques culturelles dans un tel contexte. La culture doit-elle se défendre d’être rentable ? Quels sont les effets sociaux de la marchandisation à outrance de la culture ?
Quel statut pour l’artiste ? Quelle place pour les femmes dans le milieu de l’art et de la culture ? ». C’est un regard « non-marchand » que le mouvement souhaite poser sur cette question : « Faire l’économie de la culture ? ». Sollicité dans ce cadre, Jean Blairon choisit, parmi les points de vue possibles, d’adopter celui-ci : la démocratie culturelle se situe dans un microcosme (le champ culturel) qui connaît des rapports de force à l’interne, mais aussi dans la relation avec d’autres microcosmes : le monde de l’économie et le monde politique. Il s’inscrit ainsi dans la la lignée des travaux de Bourdieu sur les champs. Ce qui lui permet d’explorer le long travail d’affranchissement du champ culturel par rapport aux deux autres, ainsi que les conditions de cet affanchissement.
Par Jean Blairon Paru dans Pour parler de Paix n° 118 de Justice et Paix, « La vie après le coronavirus » https://www.justicepaix.be/category/nos-publications/les-numeros/ |
L’association Justice et Paix consacre un numéro de son trimestriel de mars 2022 à un recul réflexif sur deux ans de crise sanitaire, pour envisager « le monde d’après ». Sollicité dans ce cadre, Jean Blairon aborde la question au travers des recueils opérés par RTA, durant la crise, auprès de d’acteurs de l’éducation permanente, de permanents syndicaux, de travailleurs sociaux et de bénéficiaires de ce travail. Passé le moment de sidération devant la pandémie, un grand espoir s’était fait jour que cette épreuve soit suivie d’un « monde d’après » qui ne serait plus celui « d’avant » ; et notamment l’espoir que les habituelles vulgates sur lesquelles se base la domination seraient abandonnées. Malheureusement, cela n’a pas été le cas. Au départ des enquêtes précitées, Jean Blairon analyse trois mécanismes qui expliquent ce fonctionnement de régression aux situations problématiques d’avant. Ce sont ainsi trois pré-interprétations redoutables dont il faut, pour paraphraser Milan Kundera, « déchirer le rideau ».
Intervention de Jean Blairon lors de la semaine sociale du MOC, 14 avril 2022 Paru dans le magazine Politique, hors-série n°32 du 4/11/2022. https://www.revuepolitique.be/hors_serie/le-moc-a-100-ans-et-apres/ |
Pour ses 100 ans, et à l’occasion de sa centième semaine sociale, le MOC a choisi de reparcourir son histoire et celle du mouvement ouvrier et de ses luttes pour l’émancipation ; de questionner le modèle de la social-démocratie ; de se réinventer pour l’avenir.
Sollicité pour apporter son regard sur cette troisième partie, Jean Blairon a choisi le prisme du devenir associatif, autour de cette question : « l’associatif fait-il partie du mouvement de réinvention dans lequel nous sommes invités à entrer ? ». Considérant l’associatif comme un champ (menacé, notamment par le nouveau CSA qui assimile les associations à des sociétés), il explore les trois questions suivantes.
- Qu’est-ce ça implique de considérer la vie associative comme un champ ? - Quelles sont les forces contraires que la vie associative doit affronter ? - Est-ce que ce double état des lieux permet d’identifier des questions stratégiques pour le devenir associatif et pour les organisations sociales qui en font une porte d’entrée importante et légitime pour comprendre et participer à la production de la société ?
Par Jean Blairon Pour le CIDJ de Rochefort, à paraître dans leur magazine Nos désirs font désordre, #3, prévu décembre 2022 :https://www.cidj-rochefort.be/articles-et-publications |
Le Centre d’Information et de Documentation pour Jeunes de Rochefort publie depuis peu un magazine Nos désirs font désordre, qui rassemble : « - des paroles de jeunes sous forme de photos, textes, projets menés par le CIDJ et différents partenaires associatifs ; - des contributions d'expert·e·s apportant des éclairages théoriques ; - des ressources, idées, pistes pour aller plus loin ;
le tout offrant aux ados et adultes (parents, professionnels de la jeunesse) une information complète et fiable sur des thématiques variées. » Pour son 3è numéro, le CIDJ souhaitait « interroger le modèle de société dominant, ses éléments structurant notre monde et conditionnant la vie des jeunes ». Il a sollicité Jean Blairon pour opérer un focus historique sur le secteur jeunesse, et en particulier sur la naissance même des organisations de jeunesse : qu’y avait-il dans leur trousseau ? Qu’est-ce qui a conduit leur développement ? La volonté d’agir sur la société y était-elle d’emblée présente ? Etait-elle explicite ?
Il n’y a ni doute ni ambiguïté en la matière. Remettre des traces du passé en circulation pour répondre à ces questions, c’est en effet éclairer d’un jour acéré le sens de ces institutions. C’est au départ de la référence centrale en la matière qu’est Marcel Hicter que l’auteur développe son propos.
Rapport
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2Le constat est le même dans l’ouvrage Techno-luttes, enquête sur ceux qui résistent à la technologie, Paris, Seuil/Reporterre, septembre 2022. 3Dans son ouvrage Les trois écologies, F. Guattari, un des fondateurs de l’analyse institutionnelle, se définissait comme « un opérateur de transversalités ». 4Voir la présentation que donne de cette logique J. Fastrès dans sa typologie des réseaux : « Les réseaux ayant pour centre de gravité l’action/les actions », 5Claude Lefort, cité par Michel Wieviorka, Pour une démocratie de combat, Paris, Laffont, 2020, p. 350. |
Ci-dessous les enseignements généraux de cette réalisation. Lire la note et le rapport en PDF |
Rapport
Pourquoi il faut supprimer
le statut de cohabitant
Sur le fond
L’action pour la suppression du statut de cohabitant et le service de sensibilisation qui doit la soutenir s’inscrit dans un contexte des plus compliqués, puisque que dans plus d’un cénacle (politique ; académique) des reproches sont adressés au système de sécurité sociale qui « ne remplirait plus ses fonctions », « ne serait plus adapté », bref « devait être modernisé ».
Le thème de la « modernisation » cache trop souvent des volontés de démantèlement ou de régression ; de plus, il est utilisé pour discréditer les opposants, qualifiés fort commode d’obstacles au Progrès.
Sur le fond, la réalisation du service se fait donc dans un contexte doublement difficile : il faut aller à rebours du discours de modernisation et montrer au contraire que la suppression du statut ne touche pas seulement une catégorie de personnes déjà négligées si ce n’est stigmatisées, mais bénéficierait à tous.
Cette réalisation au service d’une campagne nous confronte au défi de trouver les moyens de sortir du registre « corporatiste » (des revendications énoncées pour une catégorie de personnes, dans un domaine, etc.) dans lequel trop de protestations ou de critiques sont cantonnées.
La manière de relever ce défi a consisté à choisir comme point de vue que le sens de l’histoire va dans la direction de rendre la sécurité sociale de plus en plus universelle. C’est la thèse soutenue notamment par Mateo Alaluf qui a participé aux discussions relatives à la conception des réalisations.
Ce point de vue intègre aussi la pensée de Robert Castel pour qui la sécurité sociale est la propriété de ceux qui n’ont pas de propriété privée.
Evoquer la propriété sociale, c’est évidemment convoquer comme protagonistes les partenaires sociaux et singulièrement les syndicats.
Il a paru essentiel en la matière d’arriver à établir une convergence relativement à la revendication jugée prioritaire : « étendre la sécurité sociale, c’est d’abord supprimer le statut de co-habitant ».
La dimension historique qui permet de tracer un sens de l’histoire a été confiée à Aline Bingen de l’Ulb qui mène une série de recherches sur cette question.
Rendre une question «publique»
Dans nos travaux d’analyse institutionnelle, nous avons posé, dans le sillage de C.W. Mills1 que le travail politique qui consiste à « mettre une question à l’ordre du jour » (et c’est bien le travail de l’éducation permanente) passe par deux impératifs :
- il faut rendre la question « sensible » (du fait par exemple de son ampleur, de son intensité ou de son exemplarité) ;
- il faut la faire « adopter » par ceux qui, n’étant pas directement concernés, acceptent de la faire leur et de considérer qu’elle doit trouver solution.
C’est cette logique qui a inspiré la logique de réalisation : un témoignage d’un « témoin du vécu » relate les effets délétères de ce statut dans sa vie ; un acteur (syndical, académique, associatif) commente la situation et argumente, selon son point de vue, pourquoi elle est inacceptable dans notre société.
Il ou elle exprime ensuite son engagement à supprimer ce « statut » (étrange statut qui prive de droits...).
La représentativité des personnes qui expriment cet engagement est évidemment un élément majeur de la réalisation, puisqu’il s’agissait de Jean-François Tamellini, Marc Becker, Aline Bingen et Christine Mahy.
Une double exigence pour le travail démocratique
Ce travail n’a pu que nous relier à une série de positions prises par Michel Wieviorka dans son ouvrage Pour une démocratie de combat2 : la réinvention démocratique passe par une double exigence qu’il présente comme suit :
« mais si la démocratie n’est pas seulement défensive, ensemble de garanties limitant les pouvoirs des dominants, si elle aussi source de progrès, de créativité, de transformation, d’inventivité, si elle crée d’abord les conditions favorables à des processus de subjectivation [qui permettent aux sujets et aux groupes de se créer et de créer leur existence], cela implique des sciences humaines et sociales procédant plutôt à partir du sujet individuel. En fait, il y a là une double exigence, il s’agit d’être capables de circuler d’un registre à l’autre, du système au sujet personnel, et vice versa. »
Il nous a semblé qu’il y avait là une voie pour l’éducation permanente : être source de créativité et d’inventivité ; connecter des registres aussi éloignés que le système et le vécu, essentiellement de ceux qui ne sont ni entendus ni même visibles aux yeux dominants.
LES RÉALISATIONS
Elles ont été diffusées au Théâtre de Namur lors de la journée du 17 octobre 2022: https://www.rwlp.be/1710/#17102022-videos
En voici le détail.
- 150€ pour le reste
Interviews Julien Buffo et Christine Mahy
- Les attachements détruits
Interviews Lena Loucks et Jean-François Tamellini
- Puisqu’on l’a déjà fait
Interviews Margaux Chauvaux et Aline Bingen
- S’enfoncer pour s’en sortir
Interviews Yoan Taboga et Marc Becker
Notes 1C.W. Mills, L’imagination sociologique, Paris, La Découverte, éd. Française 2006. La quatrième de couverture précise ceci : « L’auteur explore le rapport des sciences sociales aux valeurs et leur contribution à la dynamique de la démocratie, qui implique que toutes les personnes affectées par une décision humaine aient leur mot à dire dans cette décision. » Nous avons analysé une série d’exemples de ce fonctionnement dans E. Servais et J. Blairon, L’institution recomposée, tome 1 Petites luttes entre amis, Bruxelles, Luc Pire, 2000. 2M. Wieviorka, « Les chantiers de la réinvention démocratique », in Pour une démocratie de combat, Paris, Laffont, 2020, p. 354 notamment. |
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