RTA - Newsletter Intermag 2024
Télécharger cette présentation en pdf1. Le processus de recherche participativeEn éducation permanente, une recherche participative désigne un travail collectif qui rétablit les conditions de l’égalité : il n’y a pas d’un côté des chercheurs, sujets de la recherche et de l’autre des personnes observées, objets de celle-ci. Le collectif qui est créé met tout le monde sur un même pied (professionnels et non-professionnels) et s’appuie sur toutes les ressources de chacun : expériences, connaissances, capacité de recul et réflexion. Si une recherche-action part de l’expérience des premiers concernés, la recherche participative va plus loin : le collectif qu’elle mobilise décide de toutes les étapes – sur quoi on va travailler, comment on va le faire, à quel rythme, pour qui on va travailler. Cette recherche participative est le fruit d’un partenariat entre l’asbl RTA (Réalisation Téléformation et Animation) et le RWLP (Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté). 2. Les enjeux liés à l’alimentationLe thème de l’alimentation est devenu hautement paradoxal, plus que jamais actuel. Nous vivons dans une société riche, où s’impose de plus en plus la thématique de l’alimentation saine, du retour à l’authenticité du goût, mais aussi de la proximité, du circuit court, que la pandémie de covid a brusquement mise au goût du jour, mais qui reste encore trop réservée aux ménages les plus aisés. Au RWLP, la question lancinante qui tenaille bien des familles en situation de pauvreté est bien différente : « que va-t-on mettre dans l’assiette demain ? ». Question pragmatique et dramatique tout à la fois : il est souvent impossible de pouvoir se nourrir sans recourir à des systèmes d’aide alimentaire, et sans mal nourrir sa famille. Il est dès lors impossible de se nourrir librement, en toute autonomie. Le droit à l’alimentation est au cœur de la question, ce qui est des plus inquiétant dans une société aussi riche que la nôtre. C’est dans cette même société que les agriculteurs en colère, premiers pourvoyeurs d’alimentation, sont contraints de bloquer les villes et les entrepôts de la grande distribution pour crier leur colère parce qu’on leur impose des normes dont sont dispensés d’autres pays qui inondent notre marché de produits moins chers. Eux aussi sont mis à mal et vivent souvent dans la précarité. Le droit à vivre décemment de son labeur est au centre de la question. Sont donc concernés des consommateurs et des producteurs, de plus en plus mis en marge de cette société. Les enjeux traversés sont sanitaires, économiques, culturels et sociaux, sur fond de non respect de droits fondamentaux. 3. Le point de départ du projet de recherche
On constate depuis quelques temps un mouvement, inspiré de travaux français notamment, qui s’attelle à étudier une forme de sécurité sociale alimentaire, à l’instar de ce qui se fait pour les allocations familiales ou la santé : un accès pour tous à un montant mensuel pour se nourrir. Pour séduisante qu’elle soit, la formule n’est pas sans poser question. C’est que le thème de la sécurité sociale alimentaire est susceptible de deux interprétations. Pour les uns, il s’agit d’octroyer une aide à tous (dans la logique de l’allocation universelle ou des allocations familiales) ; pour d’autres, cette aide doit avoir pour effet de réduire les inégalités, et donc ne pas concerner tout le monde de façon indifférenciée. D’autre part, la réponse politique au problème de l’alimentation peut prendre la forme de mesures de nature plus caritative, souvent assorties de conditions strictes, ou vécues par les familles en situation de pauvreté comme très contraignantes. Nous avons donc plusieurs niveaux en relation :
L’analyse institutionnelle, qui est l’approche privilégiée par RTA, invite toujours à lire le local à partir du global ; elle constitue donc une approche appropriée pour tenter de percevoir les articulations diverses entre ces niveaux.
Les acteurs Le RWLP s’est engagé avec Paysans-Artisans dans une expérimentation qui se situe entre les deux pôles que nous avons évoqués : ni dans la mouvance de la sécurité sociale alimentaire, ni comme un jalon supplémentaire des solutions alternatives de type caritatif. Par ailleurs, cette expérimentation réunit des acteurs plutôt minoritaires si ce n’est dominés, dans un contexte où les petits producteurs semblent être plus en alliance avec les consommateurs aisés ou fortunés. Coopérative de producteurs et de consommateurs active dans le namurois depuis une dizaine d’années, Paysans-Artisans « se bat pour le déploiement d’une agriculture paysanne et coopérative, libérée de la main-mise de l’agro-industrie et du quasi monopole de la grande distribution » [https://paysans-artisans.be/]. L’expérimentation décidée avec le RWLP porte sur l’accès à des aliments de qualité et en circuit court pour des personnes en situation de pauvreté. Pour une série de témoins du Vécu Militants (TVM) du RWLP, habitant Namur, une carte permettant des achats à hauteur de 50 euros par semaine, dont 50 % sont à charge des acheteurs, sera mise à disposition, sans conditions. Par ailleurs, une carte collective sera également remise au RWLP en tant qu’association. La recherche participative portera sur l’observation fine de ce que le RWLP nomme une « expérience solidaire » : comment accéder, pour des personnes en situation de pauvreté, aux magasins de Paysans-Artisans, tout en garantissant aux producteurs des revenus décents ? Durant plus d’un an, cette recherche participative se déploiera afin de dégager des enseignements sur les conditions de réussite d’une telle expérimentation, menée entre citoyens, dans l’esprit coopératif et associatif, en tenant compte des différents niveaux décrits supra.
4. La première étape
Le 15/02/2024, le RWLP avait invité deux responsables de Paysans-Artisans à expliquer le projet qu’ils souhaitaient proposer aux TVM réunis pour la circonstance. RTA a été invité à cette réunion, et a eu l’occasion de rappeler en quoi consistait une recherche participative en éducation permanente, proposant d’en réaliser une à l’occasion de cette expérimentation. A la suite de cette réunion, un groupe de TVM a accepté de se lancer dans la recherche participative. Dès cette date, des cartes de réduction ont été distribuées. La première réunion collective de la recherche participative s’est déroulée le 14 mars 2024 avec les TVM ; la question globale de recherche y a été confirmée (dégager les conditions de réussite d’une expérience libre et citoyenne), et les premiers questionnements ont pu être affinés au départ des premiers usages de la carte. Un modus operandi organisationnel a aussi été décidé, à l’unanimité.
Le groupe de recherche, au départ, est formé de membres de Paysans-Artisans et de TVM et membres du personnel du RWLP. Il est appelé à s’étoffer dans les phases qui suivent.
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1, Rue des Rèlîs Namurwès |