RTA - Newsletter Intermag 2018 / 15
Va-te-laver – Questions d’hygiène 2
Un « va-te-laver », dans le langage populaire, signifie « volée de coups » (Littré). Si l’expression n’est plus usitée, elle a été remplacée, dans le langage courant par d’autres, tout aussi évocatrices et reliées à la question de l’hygiène, comme « passer un savon » ; « se faire laver la tête » ; « se faire frotter les oreilles ». C’est dire si l’hygiène peut avoir, au sens figuré, un côté très coercitif. Dans une précédente newsletter, nous avons abordé l’hygiène par trois lorgnettes (micro, méso, macro) pour mieux en approcher les composantes multiples qui en font un sujet si difficile à aborder. Dans la présente newsletter, nous en aborderons les côtés plus coercitifs, ou ressentis comme tels par ceux qui doivent ou ont dû subir des exigences hygiéniques imposées de l’extérieur. Hygiène alimentaire – Quand l’excès de bureaucratie met à mal la cohésion socialePar Jacqueline Fastrès L’Afsca, l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire, est chargée de vérifier l’observance des normes d’hygiène dans tous les établissements publics où de la nourriture est servie. C’est le cas, aussi, dans les services de l’aide à la jeunesse qui hébergent des mineurs en danger (les SAAE), qui sont souvent de petites structures, à dimension familiale. Tous les éléments qui permettent d’entretenir la convivialité y ont une importance ; c’est le cas des repas et de la nourriture en général. Dans ce cadre, l’intervention de l’Afsca n’est pas sans conséquences ni dommages collatéraux en matière de cohésion sociale dans l’environnement et de pouvoir d’agir des jeunes hébergés. De l’hygiène physique à l’hygiène moralePar Jacqueline Fastrès Si plusieurs paradigmes se sont succédé au cours du temps pour envisager la question de l’hygiène, ils ne se sont pas construits par hasard. Nous nous attacherons ici à voir sur quels type de rouages sociaux l’hygiène à contribué à jouer, et spécialement à partir du XIXè siècle. L’hygiénisme s’érige alors en doctrine centrale pour la gestion de la cité. Le retour d’épidémies et de la peur qui les accompagne, les progrès scientifiques et les découvertes médicales, le développement industriel sont des éléments qui encouragent son développement. Au-delà, la promotion de l’hygiène devient un instrument de conservation et de contention de la classe ouvrière en pleine expansion. Dans un grand mouvement métonymique, la propreté devient synonyme de moralité, et inversement la saleté est associée à l’immoralité. Ce qui permet de substituer la cause à la conséquence : le manque d’hygiène, ainsi, ne serait pas la conséquence de la pauvreté, mais la cause d’un laisser-aller qu’il convient de combattre tout en en contrôlant les moyens. On voit dès lors se dessiner des éléments qui permettent de construire le pauvre en ennemi. Ce retour historique incite aussi à un recul réflexif sur ce qui peut rester, dans les esprits du XXIè siècle, de cette construction. |
Décembre 2018 1, Rue des Rèlîs Namurwès
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